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Néant
A MA FEMME...
FICHE TECHNIQUE DU LIVRE
Titre : Lettres de mon moulin
Auteur : Alphonse DAUDET
Edition : AUX ÉDITIONS TERRES LATINES
exemplaire n° 1108
« LEURS CHEF-D'ŒUVRE »
ILLUSTRATIONS DE
MARIANNE CLOUZOT
Couleurs pleine page hors-texte et,
noir & blanc in texte.
Poids : 565 grammes Nombre de pages : 185
Reliure : Reliée sur cartonnage
TABLE DES MATIÈRES : OUI
Format : 170 x 210 mm
I.S.B.N : NON Code Barre = EAN
: NON
Livre épuisé chez l' Editeur
AVANT- PROPOS
Par-devant maître Honorat Grapazi, notaire à la résidence de Pampérigouste,
« A comparu :
« Le sieur Gaspard Mitifio, époux de Vivette Cornille, ménager au lieudit des cigalières et y demeurant :
« Lequel par ces présentes a vendu et transporté sous les garanties de droit et de fait, et en franchise de toutes dettes, privilèges et hypothèques.
« Un moulin à vent et à farine, sis dans la vallée du Rhône, au plein cœur de Provence, sur une côte boisée de pins et de chênes verts; étant ledit moulin abandonné depuis plus de vingt
années et hors d'état de moudre, comme il appert des vignes sauvages, mousses, romarins, et autres verdure s parasistes qui lui grimpent jusqu'au bout des ailes ;
« Ce nonobstant, tel qu'il est et se comporte, avec sa grande roue cassée, sa plate-forme où l'herbe pousse dans les briques, déclare le sieur Daudet trouver ledit moulin à sa convenance
et pouvant servir à ses travaux de poésie, l'accepte à ses risques et périls, et sans aucun recours cntre le vendeur, pour cause de réparations qui pourraient y être faites.
« Cette vente a lieu en bloc moyennant le prix convenu, que le sieur Daudet, poète, a mis et déposé sur le bureau en espèces de cours, lequel prix a été de suite touché et retiré par le
sieur Mitifio, le tout à la vue des notaires et des témoins soussignés, dont quittance sous réserve.
« Acte fait à Pampérigouste, en l'étude Honorat, en présence de Francet Mamaï, joueur de fifre, et de Louiset dit le Quique, porte-croix des pénitents blancs;
« Qui ont signé avec les parties et le notaire après lecture... »
source = aux Éditions Terres Latines
EXTRAIT La chèvre de Monsieur SEGUIN, by Alphonse DAUDET
LA CHÈVRE DE M. SEGUIN
A M. Pierre Gringoire, poète lyrique à Paris.
... Ah! Gringoire qu'elle était jolie la petite chèvre de M. Seguin! Qu'elle était jolie avec yeux doux, sa barbiche de sous-officier, ses sabots noirs et luisants, ses cornes zébrées et
ses longs poils blancs qui lui faisaient une houppelande! C'était presque aussi charmant que le cabri d'Esméralda, tu te rappelles, Gringoire? - et puis docile, caressante, se laissant traire
sans bouger, sans mettre son pied dans l'écuelle. Un amour de petite chèvre...
M. Seguin avait derrière sa maison un clos entouré d'aubépines. C'est là qu'il mit sa nouvelle pensionnaire. Il l'attacha à un pieu, au plus bel endroit du pré, en ayant soin de lui
laisser beaucoup de corde, et de temps en temps, il venait voir si elle était bien. La chèvre se trouvait très heureuse, et broutait l'herbe de si bon cœur que M. seguin était ravi.
- Enfin, pensait le pauvre homme, en voilà une qui ne s'ennuiera pas chez moi! .
M. Seguin se trompait, sa chèvre s'ennuya.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Quand la chèvre blanche arriva dans la montagne, ce fut un ravissement général. Jamais les vieux sapins n'avaient rien vu d'aussi joli. On la reçut comme une petite reine. Les châtaigniers
se baissaient jusqu'à terre pour la caresser du bout de leus branches. Les genêts d'or s'ouvraient sur son passage et sentaient bon tant qu'ils pouvaient. Toute la montagne lui fit la fête.
Tu penses, Gringoire, si notre chèvre était heureuse! Plus de corde, plus de pieu... rien qui l'empêchât de gambader, de brouter à sa guise... C'est là qu'il y en avait de l'herbe! Jusque
par-dessus les cornes, mon cher!... Et quelle herbe! Savoureuse, fine, dentelée, faite de mille plantes... C'était bien autre chose que le gazon du clos. Et les fleurs donc!... De grandes
campanules bleues, des digitales de pourpre à longs calices, toute une forêt de fleurs sauvages débordant de sucs capiteux!...
La chèvre blanche, à moîtié soûle, se vautrait là-dedans les jambes en l'air et roulait le long des talus, pêle-mêle avec les feuilles tombées et les châtaignes... Puis, tout à coup elle
se redressait d'un bond sur ses pattes. Hop! la voilà partie, la tête en avant, à travers les maquis et les buissières, tantôt sur un pic, tantôt au fond d'un ravin, là-haut, en bas, partout...
On aurait dit qu'il y avait dix chèvres de M. Seguin dans la montagne.
C'est qu'elle n'avait peur de rien, la Blanquette.
Elle franchissait d'un saut de grands torrents qui l'éclaboussaient au passage de pousière humide et d'écume. Alors toute ruisselante, elle allait s'étendre sur quelque roche plate et se
faisait sécher par le soleil... Une fois, s'avançant au bord d'un plateau, une fleur de cytise aux dents, elle aperçut en bas, tout en bas dans la plaine, la maison de M. Seguin, avec le clos
derrière. Cela la fit rire aux larmes.
- Que c'est petit! dit-elle; comment ai-je pu tenir là-dedans?
Pauvrette! de se voir si haut perchée, elle se croyait au moins aussi grande que le monde...
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Tout à coup le vent fraîchît. La montagne devint violette; c'était le soir...
- déjà! dit la petite chèvre; et elle s'arrêta fort étonnée.
En bas les champs étaient noyés de brume. Le clos de M. Seguin disparaissait dans le brouillard, et de la maisonnette on ne voyait plus que le toit avec un peu de fumée. Elle écouta les
clochettes d'un troupeau qu'on ramenait, et se sentit l'âme toute triste... Un gerfaut, qui rentrait, la frôla de ses ailes en passant. Elle tressaillit... puis ce fut un long hurlement dans la
montagne.
- Hou! hou!
Elle pensa au loup; de tout le jour, la folle n'y avait pas pensé. Au même moment une trompe sonna bien loin dans la vallée. C'était ce bon M. Seguin qui tentait un dernier effort.
Hou! hou!... faisait le loup.
- Reviens! reviens!... criait la trompe.
Blanquette eut envie de revenir; mais en se rappelant le pieu, la corde, la haie du clos, elle pensa que maintenant elle ne pourrait plus se faire à cette vie, et qu'il valait mieux
rester.
La trompe ne sonnait plus...
La chèvre entendit derrière elle un bruit de feuilles. Elle se retourna et vit dans l'ombre deux oreilles courtes toutes droites, avec deux yeux qui reluisaient.. C'était le loup.
Enorme, immobile, assis sur son train de derrière, il était là, regardant la petite chèvre blanche et la dégustant par avance. Comme il savait bien qu'il la mangerait, le loup ne se
pressait pas; seulement, quand elle se retourna, il se mit à rire méchamment.
- Ha! ha! la petite chèvre de M. Seguin; et il passa sa grosse langue rouge sur ses babines d'amadou.
Blanquette se sentit perdue... Un moment, en se rappelant l'histoire de la vieille Renaude, qui s'était battue toute la nuit pour être mangée le matin, elle se dit qu'il vaudrait peut-être
mieux se laisser manger tout de suite; puis, s'étant ravisée, elle tomba en garde, la tête basse et la corne en avant, comme une brave chèvre de M. Seguin qu'elle était... Non pas qu'elle eût
l'espoir de tuer le loup, - les chèvres ne tuent pas le loup, - mais seulement pour voir si elle pourrait tenir aussi longtemps que la Renaude...
Alors le monstre s'avança, et les petites cornes entrèrent en danse.
Ah! la brave chevrette! comme elle y allait de bon cœur! Plus de dix fois, je ne mens pas, elle força le loup à reculer pour reprendre haleine. Pendant ces trêves d'une minute, la
gourmande cueillait en hâte encore un brin de sa chère herbe, puis elle retournait au combat la bouche pleine... Cela dura toute la nuit. De temps en temps la chèvre de M. Seguin regardait les
étoiles danser dans le ciel clair, et elle se disait :
- Oh! pourvu que je tienne jusqu'à l'aube...
L'une après l'autre les étoiles s'éteignirent. Blanquette redoubla de coups de corne, le loup de coups de dents... Une lueur pâle parut dans l'horizon. Le chant d'un coq enroué monta d'une
métairie.
- Enfin! dit la pauvre bête, qui n'attendait plus que le jour pour mourir; et elle s'allongea par terre dans sa belle fourrure blanche toute tachée de sang...
Alors le loup se jeta sur la petite chèvre et la mangea.
Adieu, Gringoire!
L'histoire que tu as entendue n'est pas un conte de mon invention. Si jamais tu viens en Provence, nos ménagers te parleront souvent de la cabro de moussu Seguin, que se battégue touto la
neui emé lou loup, e piei lou matin lou loup la mangé.
(La chèvre de Monsieur Seguin, qui se battit toute la nuit avec le loup; et puis, le matin, le loup la mangea).
Tu m'entends bien, Gringoire :
E piei lou matin loup la mangé.
REPRODUCTION INTERDITE
source = Lettres de mon Moulin
AUX ÉDITIONS TERRES LATINES
ILLUSTRATION DE MARIANNE CLOUZOT
ANNEXE
Lettres de mon moulin, by Alphonse DAUDET
Editeur: Éditions Terres latines (1965)
A.S.I.N : B0014XAYNK
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LIENS UTILES
WIKIPÉDIA
Alphonse Daudet
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Lettres de mon Moulin
BIBLIOGRAPHIE Alphonse DAUDET