Puis le roi sonna du cor et poussa la chasse en avant, suivi de deux ou trois de ses gardes, au nombre desquels se trouvait Quentin Durward. Le
cardinal de la Balue, mauvais cavalier, voulut suivre le train, mais son cheval énervé le désarçonna et s'échappa dans les taillis, le laissant piteusement étendu sur le sol, si bien qu'il vit
passer toute la chasse sans obtenir le moindre secours.
Le cardinal tout mortifié se relevait avec peine, lorsqu'un cavalier, qui n'était autre que le comte de Crèvecœur, surgit soudain des buissons avec deux ou trois domestiques. Il fut
stupéfait de trouver là le cardinal, à pied, sans cheval et sans suite, et profita de l'occasion pour essayer de le gagner à sa cause en lui vantant discrètement le service du duc de Bourgogne.
La Balue fut sensible aux flatteries et aux promesses du comte; mais, redoutant quelque surprise, il pria Crèvecœur de s'éloigner et lui assigna un rendez-vous pour le soir.
Pendant ce temps, Louis XI suivait la chasse avec ardeur. Il arriva qu'un marcassin, traversant la route que suivait le sanglier poursuivi, donna le change à toute la meute à l'exception
de quelques chiens excellents, attirant ainsi derrière lui la majeure partie des chasseurs. Le roi vit avec un secret plaisir Dunois se lancer comme les autres sur la nouvelle piste, et il goûta
par avance la joie du triomphe qu'il allait obtenir sur ce maître-veneur. Louis, étant bien monté, suivit les chiens de fort près, et lorsque le sanglier, parvenu sur un terrain marécageux, se
retourna pour faire face à ses ennemis, le roi seul se trouva devant lui.
Sans se laisser intimider par le danger, il avança vers le fauve, qui se défendait avec fureur contre les chiens, et le frappa de son épieu; mais son cheval ayant fait un écart, le coup ne
fut pas assez fort pour mettre le sanglier hors de combat. Sa monture effrayée refusant de charger une seconde fois, le roi mit pied à terre et marcha contre l'animal furieux, son poignard de
chasse à la main. Aussitôt, le sanglier se précipita sur lui en renversant les chiens qui le harcelaient. Le roi l'attendait en bonne posture, choississant la place où il allait frapper, mais son
pied glissa soudain sur le sol humide et la pointe de son coutelas ne fit qu'effleurer l'encolure de l'animal, qui le renversa brutalement à terre.
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